Requiem de Mozart : tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le chef-d'oeuvre du grand Amadeus

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Requiem de Mozart : tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le chef-d'oeuvre du grand Amadeus

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Une page du manuscrit du Requiem de Mozart, 1791
Une page du manuscrit du Requiem de Mozart, 1791
- Wikimedia Commons

Parce que Mozart est mort en le composant, son Requiem est entré dans l’histoire auréolé de légendes. Mais au-delà de tous les mythes, la beauté de l’oeuvre demeure. Grave, solennelle, transcendante… Voici tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’ultime composition de Mozart.

1791. Une année aussi exceptionnelle que funeste pour Mozart. En plus de sa Cantate maçonnique et de l’opéra La Clémence de Titus, il compose deux de ses œuvres majeures : La Flûte enchantée, un opéra-bouffe merveilleux et initiatique, et son fameux Requiem, une oeuvre entourée de légendes et laissée inachevée par sa mort à 35 ans seulement, dans la pauvreté et la maladie.

Son propre hommage

Voici ce qu’écrit Mozart à son père Léopold, quatre ans avant d’écrire le Requiem :

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« Comme la mort [...] est l’ultime étape de notre vie, je me suis familiarisé depuis quelques années avec ce meilleur et véritable ami de l’homme, de sorte que son image non seulement n’a pour moi rien d’effrayant mais est plutôt quelque chose de rassurant et de consolateur. »

Ce calme face à la mort, on le retrouve tout au long du Requiem, messe pour les morts qui oscille entre accents terribles et tendres mélodies apaisantes et mélancoliques. D’autant qu’en 1791, cela fait plus d’un an que Mozart est gravement malade. Persuadé d’avoir été empoisonné à l’Aqua Tofana (un poison très lent) et sentant sa fin proche, c’est peut-être son propre Requiem - son propre hommage que Mozart écrit, sa dernière confidence.

Seul et contre tous

En 1789, les problèmes s'accumulent pour Mozart. Si deux ans auparavant son Don Giovanni a triomphé, les temps ont changé à Vienne, et le compositeur n’est plus à la mode. L’époque n’est pas favorable aux arts : suite à la Révolution française, les tensions montent en Europe et l’Autriche se prépare à la guerre. La culture est la première à en pâtir : le nombre de concerts baisse de moitié et Mozart est criblé de dettes. En 1790, l’empereur d’Autriche et protecteur du compositeur, Joseph II, meurt, et peu à peu le nouvel empereur marginalise Mozart, notamment en raison de ses liens avec la franc-maçonnerie.

Une cérémonie d'initiation dans la loge maçonnique de Mozart, à Vienne, en 1789
Une cérémonie d'initiation dans la loge maçonnique de Mozart, à Vienne, en 1789
- Tableau d'Ignaz Unterberger

Mozart doit aussi se séparer de son mentor et ami, « papa Haydn ». En effet, un directeur de théâtre vient proposer aux deux compositeurs un contrat très avantageux à Londres. Mais contrairement à Haydn, Mozart refuse et reste à Vienne. Souhaite-t-il se venger de tous les outrages qu’il y a subi ? Se sent-il déjà trop malade pour partir ? Dans tous les cas, Mozart est dans la période la plus sombre de sa vie. Comme l’écrit un de ses biographes, Jean Blot, « aborder l’histoire du Requiem, c’est déjà entrer dans l’agonie. »

La légende

Dans Amadeus, Miloš Forman montre Salieri - ennemi mortel de Mozart dans le film - notant le Requiem sous la dictée du compositeur mourant. Mais cette version romancée de la vie du compositeur n’est pas fidèle à l’histoire du Requiem. Dans la réalité, pas de Salieri machiavélique, qui, masqué, rend visite à Mozart quelques semaines plus tôt pour lui commander le Requiem et lui annoncer sa mort prochaine.

Un extrait du film Amadeus, où Salieri, au chevet de Mozart, note les derniers pages du Requiem

Le véritable commanditaire de cette messe des morts serait le comte Franz von Walsegg-Stuppach. Adepte des supercheries, le comte prétend composer lui-même des œuvres qu’il fait jouer lors de concerts privés - mais qui ne sont en fait que des copies de partitions déjà existantes. Pour honorer la mémoire de sa jeune épouse disparue et se faire passer une fois de plus pour un compositeur de génie, il commande anonymement à Mozart une messe des morts. Le jeune compositeur commence à faiblir et doit terminer d’autres partitions, mais la somme promise par le comte le pousse à se mettre à la tâche .

La veille de sa mort, le 4 décembre 1791, une première répétition est organisée au chevet de Mozart avec trois chanteurs, que le compositeur accompagne à l’alto. Trop malade pour continuer, il interrompt la répétition et fait venir son ancien élève, Süssmayer, pour lui indiquer comment finir son oeuvre. A minuit, le « divin Mozart » meurt. Il est enterré dès le lendemain dans une fosse commune du cimetière de Saint-Marc à Vienne, avec 16 autres cadavres.

Une composition à plusieurs mains

Parler du Requiem de Mozart n’est pas tout à fait exact. À sa mort, seules deux parties sont (quasiment) achevées : l’Introït et le Kyrie. Le reste demeure à l’état d’ébauche, avec seulement les voix et quelques indications. Le fameux Lacrimosa, qui suscite tant d’admiration, est en réalité extrêmement lacunaire, et s’interrompt au bout de huit mesures seulement. On raconte que lors de la répétition qui eut lieu la veille de sa mort, Mozart, arrivé à la 8e mesure du Lacrimosa, fondit en larmes, devinant qu’il s’agissait là des dernières lignes de musique qu’il écrivait.

Le manuscrit des cinq première mesures du Lacrimosa, de la main de Mozart
Le manuscrit des cinq première mesures du Lacrimosa, de la main de Mozart
- Wikimedia Commons

Après la mort de Mozart, sa femme Constance hérite des dettes de son mari. Elle demande alors à deux anciens élèves de son mari de finir la partition : Joseph Eybler puis Franz Xaver Süssmayr. Le comte von Walsegg (qui a commandé l’oeuvre) n’y verra que du feu et donnera à Constance un gros cachet, très attendu.

Süssmayr, l’élève de Mozart qui a véritablement achevé le Requiem, est choisi par Constance car son style d’écriture est très proche de celui de son maître. Mais il n’a pas son génie. Pour achever l’oeuvre, il s’inspire en grande partie des fragments laissés par Mozart et de certaines de ses œuvres de jeunesse. Pour la fin, Süssmayr choisit de reprendre le début du Requiem - par peur peut-être de trahir son maître ou de le réveiller d’entre les morts en concluant sa messe à sa place...

Fort comme la mort

Tout a été pensé pour que l’oeuvre soit comme la mort elle-même : à la fois pathétique et terrifiante, calme et terrible. Écrite pour quatre solistes (soprano, alto, ténor et basse), un chœur et un orchestre symphonique, Mozart a retiré tous les instruments à vent aigus (flûte et hautbois), jugés trop joyeux, pour ne garder que le cor de basset, ancêtre de la clarinette, au timbre plus feutré. Grave et solennel, l’orchestre convient parfaitement à une messe des morts, et l’écriture de Mozart est elle-même sobre, voire austère : pas d’effets brillants ni de grands solos virtuoses.

Le spectaculaire est ailleurs : le chœur a le devant de la scène et laisse éclater sa puissance. Dans le Dies Irae, moment du Jugement dernier, une formidable tempête survient : les terribles appels du chœur figurent tantôt la colère divine qui s’abat sur les hommes, tantôt des tentatives d’adoucir cette colère, tantôt des cris de terreur… Tout tremble d’angoisse, de fièvre et d’impatience. L’ultime composition de Mozart touche au sublime.

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Rendre hommage en musique : toute une histoire

Le requiem est un des genres musicaux les plus anciens, dont les origines remontent au premier millénaire, avec l’expansion du christianisme et la naissance du chant grégorien dans les églises. Quand Mozart se met à l’écriture de son Requiem, une longue tradition le précède donc. En plus du chant grégorien lui-même, une de ses principales inspirations, c’est le Requiem de Michael Haydn, le frère de Joseph, dont il a repris la structure.

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Suite à cette longue tradition de messes des morts, la tonalité de Ré mineur s’est imposée comme le symbole de l’au-delà dans la musique. Le Requiem de Mozart adopte donc cette tonalité, et c’est aussi celle du Commandeur assassiné dans Don Giovanni, ou encore du quatuor à cordes La Jeune fille et la Mort de Schubert.

Le Mitan des musiciens
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