Quelle est la meilleure version de la Symphonie n°2 "Résurrection" de Gustav Mahler ?
Par Flora SternadelSophie Bourdais, Bertrand Dermoncourt et Christian Merlin élisent la version de référence de la Deuxième Symphonie « Résurrection » de Gustav Mahler.
(ré)écouter l'émission : La Tribune des critiques de disques du 16 avril 2017.
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compte-rendu
Un geste sans conviction, des phrases morcelées, plombées par une introduction laborieuse : privilégiant l’élégance, comme s’il fuyait d’avance tout excès, Pierre Boulez propose un Mahler doux et velouté. Et passe à côté de la Résurrection.
Après un premier mouvement à la dramaturgie pâlotte, l’Andante et le Scherzo vus par Otto Klemperer n’offrent guère d’effets ni d’arrière-plans ; de surcroît, les cordes du Philharmonia manquent de séduction et les vents ne racontent rien. Cette version de référence, extérieure au drame, ne captive plus !
Charme et sérénité distinguent la lecture pacifiée de Zubin Mehta, à la tête d’une Philharmonie de Vienne soyeuse. Mais les deux excellents solistes (Ludwig et Cotrubas) émergent d’un chœur flou et lointain, qui casse l’élan de la résurrection finale. On aurait aimé davantage de contrastes et d’incarnation.
Acerbe, la Résurrection de Leonard Bernstein est sculptée dans un bloc noir dont le hiératisme révèle inquiétude et violence. La Totenfeier, assez lente, expose des enjeux terrifiants, tandis que l’Andante, étiré jusqu’à l’excès, s’enchaine sur un Scherzo macabre. Vaste cathédrale sonore, le final est une ouverture vers l’immensité que Bernstein le démiurge investit sans jamais relâcher la tension.
Lyrisme et plénitude caractérisent le Mahler de Bernard Haitink, qui relance constamment le jeu de questions/réponses, usant du rubato pour placer chaque mouvement sous le joug d’une arche grandiose. Ainsi, l’incendiaire Totenfeier annonce déjà ce que sera la péroraison finale, conclusion visionnaire d’une progression implacable, servie par un Philharmonique de Berlin aux couleurs et à la puissance illimitées.
Michael Gielen et les forces de la SWR optent pour une lecture minérale de la Deuxième Symphonie, qui s’élève d’emblée dans toute sa majesté. Au sein d’un bel espace sonore, l’orchestre respire, chante, tranchant et concentré ; l’Andante se nimbe de nostalgie, le Scherzo ricane, et le final exalte une ferveur jamais tapageuse, grâce à un chœur magnifiquement fondu à l’orchestre. Quelle lumière, quelle noblesse !
palmarès :
N°1 Version C
Cornelia Kallisch, Juliane Banse, EuropaChorAkadamie, Orchestre symphonique de la SWR de Baden-Baden et Fribourg, dir. Michael Gielen (Hänssler, 1996)
N°2 Version D
Jard van Nes, Sylvia McNair, Ernst-Senff-Chor, Orchestre Philharmonique de Berlin, dir. Bernard Haitink (Decca, 1993)
N°3 Version E
Jennie Tourel, Lee Venora, The Collegiate Chorale, Orchestre Philharmonique de New York, dir. Leonard Bernstein (Sony, 1963)
N°4 Version A
Christa Ludwig, Ileana Cotrubas, Chœurs de l’Opéra de Vienne, Orchestre Philharmonique de Vienne, dir. Zubin Mehta (Decca, 1975)
N°5 Version B
Hilde Rössl-Majdan, Elisabeth Schwarzkopf, Chœurs et Orchestre Philharmonia, dir. Otto Klemperer (Warner, 1961)
N°6 Version F
Michelle DeYoung, Christine Schäfer, Wiener Singverein, Orchestre Philharmonique de Vienne, dir. Pierre Boulez (DG, 2005)