Le duo IANA des pianistes Christine Wodrascka et Betty Hovette, enregistré en public à Radio France

Le duo Iana par Emmanuel Decker
Le duo Iana par Emmanuel Decker
Le duo Iana par Emmanuel Decker
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Dans A l’Improviste ce soir un piano dédoublé, augmenté ; un "piano-monde" qui a jailli sous les doigts de Chistine Wodrascka et Betty Hovette lors de notre session publique le 09 avril dernier.

Concert du duo IANA
avec Christine Wodrascka, piano et Betty Hovette, piano
Enregistré en public au studio 106 le 09 avril 2018 à Radio France

Elles vivent toutes les deux à Toulouse.
Elles explorent la matière sonore de ce nouveau duo depuis un peu plus d’un an. Elles ont joué un premier concert dans leur ville en janvier 2017, puis ont été invitées à jouer au festival de Donaueschingen la même année en novembre. La SWR leur a permis d’enregistrer un album en amont du festival. Et l’été nous permettra de les retrouver à Luz Saint-Sauveur le 12 juillet.
Ce duo n’a pas fini de nous enchanter !

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Christine Wodrascka et Betty Hovette ont beau être improvisatrices, elles ne laissent rien au hasard, pas même le nom de leur duo qu’elle empruntent à un Janus féminisé (mais la Déesse Jana était chez les romains la déesse des passages).
Ce sont des musiciennes jusqu’au-boutistes, voire entêtées. Elles jouent droit devant et ne se retournent pas  ! Elles ont le goût de l’exploitation et des extrêmes, et ont décidé d’en découdre avec "l’espace" du piano.
Leur musique résulte d’un laboratoire, de recherches de plusieurs mois sur la matière du piano, ce piano qui sous leurs doigts subit quantité de métamorphoses. Il y’a donc une part de composition dans la musique tissée par les deux musiciennes. Les trames sont là..

Leur performance s’apparente à une traversée en haute mer. Un océan prend possession du suit, nous sommes emportés par la lame !
Peut-être qu’il fait voir là une relation à la sensibilité de Christine Wodrascka, ses affinités avec la nature, les éléments, les cascades, les pluies, les rivières. Sensibilité aussi aux déferlantes de deux autres grands pianistes ; Cecil Taylor, musicien gigantesque, trop vite oublié, et Fred van Hove, pianiste improvisateur de haute mer…
De Fred van Hove, Christine Wodrascka a gardé en partage cette façon de pétrir le clavier ou de la malaxer, comme on le fait d’une pâte, pour en extraire tout le potentiel

Bien sûr, on peut écouter le duo Iana les yeux fermés, mais les images de ce concert vous donneront une idée du jeu physique de ces deux musiciennes. Merci à Jean-Michel Desprez pour ces images !

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Petite divagation sur la musique du duo Iana, par Anne Montaron

"Si le piano était un oiseau, et son couvercle cette aile noire si joliment évoquée par le romancier Alberto Savinio, le duo Iana pourrait être la rencontre de deux oiseaux envoyés par le Dieu Janus, ou par Jana, la déesse des passages.   Deux oiseaux, à qui les dieux auraient confié leur secret, celui de rendre imperceptibles les passages et de maintenir ouvertes les portes qui voudraient séparer deux mondes, d’un côté la musique qui s‘improvise dans le moment, et de l’autre une musique savamment élaborée.   Iana pourrait être ce Bosphore sonore, cet endroit, où deux sensibilités viennent se trouver, s’unir, fusionner,  comme fusionnent dans les eaux du Bosphore la Mer Noire et la Mer de Marmara. Deux pianos qui n’en font plus qu’un !   Et imperceptiblement, après Janus et le Bosphore, une autre image surgit ; celle de deux femmes dans un village Inuit, faisant résonner, par simple jeu, leurs voix dans la bouche l’une de l’autre, jusqu’à ce que ces deux voix ne soient plus qu’une seule.   C’est à cette magie-là que Christine Wodrascka et Betty Hovette nous convient derrière leurs pianos disposés tête-bêche.  Entre les deux ailes noires, juste un interstice, un fin détroit, sorte de Bosphore, lieu de libre circulation, où la musique s’enrichirait des passages, et n’aurait ni commencement, ni fin !"

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